PHOTOGRAPHIE &MUSIQUE...de BERLIOZ à LE QUERREC......


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Hector Berlioz par Nadar




On sait que dès sa découverte, la photographie va servir à représenter les classes dirigeantes ainsi que les acteurs de la vie sociale et culturelle. La photographie devient pour la bourgeoisie, ce que la peinture fut à la noblesse.
À Paris, des salons vont s’ouvrir et devenir les points de convergence de toutes les célébrités. Parmi eux celui de Nadar sera l’un des plus important. Nadar invente ce que l’on appelle le portrait psychologique. Si le geste du photographe est mécanique pour réussir un bon portrait, le photographe doit accorder beaucoup d’importance au cadre photographique mais aussi au caractère de son modèle. La partie psychologique est essentielle pour l’obtention d’une photographie qui révèle le modèle. Ses photographies sont toujours actuelles, les portraits de Baudelaire, Alexandre Dumas, Sarah Bernarhd illustrent bon nombre de livres en raison de leur modernité. Pour la musique, nous avons retenu le portrait de Berlioz.
Progressivement la photo va se démocratiser et les musiciens au même titre que les peintres, les acteurs vont être photographiés.

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August Sanders

Au début du siécle August Sanders entreprend en Allemagne une oeuvre gigantesque, le portrait de la société allemande.
Pour cela, il photographie des gens de toutes professions : paysans, notables, cuisiniers, peintres etc. et bien sûr des musiciens. Ce regard qui se veut objectif sur la société allemande ne sera guère apprécié des nazis qui détruiront ses livres. Nous avons retenu le portrait d’un pianiste. L’avènement du disque va faire faire un bond à la consommation des photographies par l’industrie musicale. Il va falloir illustrer les pochettes des albums mais aussi montrer les portraits des musiciens dans la presse qui utilise de plus en plus la photographie. Comme exemple nous avons choisi une photographie de François Kollar, excellent photographe français qui pratiqua avec bonheur la photographie aussi bien dans le reportage, le studio et même la recherche graphique.

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Edith Piaf par François Kollar

ANNÉES 30
Pendant 50 ans, les studios Harcourt qui ouvrent dans les années 30, vont photographier les célébrités avec un style inimitable.
Ce sont des photographies de studio où l’éclairage est extrêmement soigné pour faire ressortir la personnalité de la personne photographiée. Roland Barthes écrit à propos des studios : « Le visage est ici un objet romanesque, son impassibilité sa pâte divine suspendant la vérité quotidienne et donne le trouble, le délice et finalement la sécurité d’une vie supérieure.

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Tino Rossi Edith Piaf

Concernant les acteurs, il écrit aussi : l’acteur d’Harcourt n’abandonne nullement le « rêve » pour la « réalité ». C’est tout le contraire : sur scène, bien charpenté, osseux, charnel de peau épaisse sous le fard ; à la ville, plane, lisse, le visage froncé par la vertu, aéré par la douce lumière du studio Harcourt. Les studios Harcourt vont ainsi constituer une fantastique mémoire en particulier pour le cinéma français.

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Willy Ronis

DE 1930 À 1960

A l’opposé peut être, la photographie humaniste en France de 1930 à 1960 avec des photographes comme Sabine Weiss, Robert Doisneau, Willy Ronis, Édouard Boubat, Izis, Janine Niepce etc. vont également s’intéresser à la musique.
Mais assez peu à travers les musiciens, la musique va être explorée à travers le bal. Important lieu de rencontre et de vie sociale pour le peuple, le bal en particulier lors du Front populaire, sera l’endroit idéal pour représenter une forme de libération populaire qu’il soit en intérieur ou en extérieur, du 14 juillet ou du bord de la Marne, en regardant ces photographies on entend l’accordéon !
La photographie de Willy Ronis à elle seule est une parfaite illustration de ce bonheur, de l’importance de ce plaisir que représentait le bal.

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Robert Franck

Les années 50 vont être marquées par un photographe essentiel dans l’histoire de la photographie. Avec son livre « Les américains », Robert Frank va révolutionner la façon de photographier et donc de voir.
Loin très loin d’une photographie hagiographique, il enregistre le quotidien le plus banal. Il retranscrit ce qu’il voit, ce qu’il ressent, c’est une photographie à la première personne loin de toute notion de l’objectivité prétendue du photographe.
La technique photographique en est révolutionnée, le grain explose des grandes plages de noir et blanc envahissent les photographies sans nuance, les cadrages sortent des conventions, bref Robert Frank fait sa révolution. Il est symptomatique que la préface du livre soit faite par Jack Kerouac : « That crasy feeling in America when the sun in hot on the Streets and music comes from the jukebox or from a nearby funeral, that’s what Robert Frank has captured in these treemudous photographs taken as he traveled on the roadaround pretically forty eight states in an old used car and with the agility, uglery, genius, sadness and strange secrecy of a shadow photographed scene that have never been seen before ». Extrait de la préface de Jack Kerouac.

Les Rolling Stones pour l’album « Exile on Main Street » se souviendront du travail de Robert Frank du travail de Robert Frank, il fera la pochette de l’album et aussi un film « Cooksucker blues » sur la tournée américaine du groupe. Ce film ne sortira jamais, les Rolling Stones n’étant guère enthousiastes et un peu effrayés par l’image que le film révélait de leurs tribulations.

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John Coltrane par Roy de Carava

Amateur de Jazz
Dans le même temps, des photographes grand amateur de jazz accompagnent la révolution be bop et l’émergence de John Coltrane.Eux aussi s’éloignent du travail très classique d’Herman Leonard (grand format et un travail de lumière extrêmement soigné qui se rapproche de la photographie de studio). Ils produisent des images en 24 x 36, qu’ils « captent » dans les conditions difficiles que leur offrent les clubs. Ils photographient la musique avant de photographier les musiciens. William Claxton, Roy De Carava devront attendre plus de 40 ans pour se faire reconnaître comme des photographes à part entière.
Le livre de De Carava a existé 30 ans sous forme de maquette avant de sortir ....



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Mick Jagger par David Bailey

Pop Music
L’arrivée de la pop au début des années 60 avec les Beatles va voir apparaître de nouveaux photographes. Ils ont le même âge que les musiciens, ont la même aspiration et ils vont s’inscrire contre les photographes des maisons de disques.
En Angleterre, l’exemple type du photographe Pop c’est David Bailey qui servira de modèle pour le film « Blow up » d’Antonioni ! Aux Etats-Unis, le premier à s’inscrire dans ce courant se sera Art Kane. C’est un photographe qui construit ses photos, et sa recherche sera de faire entrer l’univers de la Pop Music dans une photographie construite. En dehors des musiciens, il mettra en image des paroles de chanson en particulier la chanson des Beatles « Eleonor Rigby ». Très vite un nouveau magazine Rolling Stones va apparaître à San Francisco, la ville où est né le mouvement psychédélique. Le journal s’inscrit dans le mouvement de la contre culture, et là, les photographes vont faire du reportage brut.


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Keith Richards par Albert Watson

Année 80
Baron Wolman, Jim Marshall, Annie Leibovitz vont poser les bases d’un journal qui est toujours là pour rendre compte du Rock et des phénoménes de société Annie Leibovitz en travaillant de plus en plus ses portraits va devenir la star des Rolling Stones avant de changer de journal. Les années 80 avec des photographies comme Albert Watson, qui ont une maîtrise technique irréprochable vont offrir des photographies séduisantes mais fabriquées, on se rapproche dangereusement du portrait officiel.

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John Hiatt par Anton Corbjin

CORBJIN ET LE QUERREC
Chaque génération de musiciens voit apparaître une nouvelle génération de photographes du moins dans le rock.
Un bon exemple, est Anton Corbjin qui commence avec la new wave et qui ne cesse de développer et d’enrichir son univers. En France, le travail de Guy Le Querrec, est exemplaire ; sa passion pour la musique, ou plutôt les musiques, fait de lui, l’un des regards les plus importants de la relation photographie musique. L’album « Suite africaine » avec Aldo Romano, Louis Sclavis et Henri Texier fait de Guy Le Querrec le quatrième musicien : il joue du leica !

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Guy Le Querrec