ACIDULEES
Parfois,
à la campagne les dimanches étaient longs. Les rues étaient
vides, les copains à table en famille, pas le droit de
sortir.De temps en temps, après le repas nous sortions la
dauphine. Ma soeur et moi, en habit du dimanche, prenions
place,maman au volant. Direction Beaumont-sur oise, le
village d'à coté. Pour le parcours il n'y avait rien de
particulier, on traversait Bruyère et Bernes puis on
longeait l'Oise. Au feu nous traversions le pont pour
entamer l'ascension de la vieille ville. Peu de piétons,
les magasins étaient inanimés, arrivés dans la ligne droite
, nous cherchions une place de stationnement, le jeu étant
de trouver le plus prés possible surtout les jours
d'intempéries. Les portes claquaient, maman vérifiait la
bonne fermeture et nous nous empressions de rentrer dans le
hall.
Mais
juste avant la porte il y avait un arrêt obligatoire
devant les photos du film. Le cinéma « Le
Palace » brillait de tous ces néons rouges.
Pendant que maman se mettait dans la file pour acheter
et choisir les places, ma soeur et moi allions rêver
devant les photos et les affiches pour la semaine
suivante. Martine Carol, Fernandel, Romy Scheinder,
Bourvil, Louis de Funés, Pierre Richard, Jean Gabin
etc offrait un melting -pot étonnant du cinéma
populaire. Une fois installés dans les fauteuils, nous
découvrions le grand écran publicitaire, recouvert de
peinture vantant les charmes des magasins du bourg.
Parfois, nous jouions à trouver le plus rapidement un
mot choisi dans les textes publicitaires. Mais très
vite cette activité cérébrale à trouvé naturellement
ses limites, car nous connaissions par coeur les
textes! Dans un rituel éternel, les lumières
plongeaient le cinéma dans le noir et nous découvrions
les actualités du monde entier. Loin de nos petits
clochers plantés dans la vallée de l'Oise, nous
voyagions en grand et en noir et blanc le reste du
monde...Magie des images; Gaies ou tristes, douces ou
violentes, âpres ou tendres, nous étions
« boulversifiés » par ces toutes ces
fenêtres ouvertes sur le monde.Lorsque la lumière
revenait, nous avions un petit moment pour revenir sur
terre et surtout pour attaquer la prochaine étape. Il
s'agissait de repérer l'ouvreuse et de convaincre
maman de donner quelques pièces pour acheter un paquet
de bonbons. Sa résistance n'était pas très forte, mais
nous savions tous trois quelle était indispensable
pour que cela ne devienne une chose dû. Les grand
favoris étaient les bonbons tendres et gouteux aux
arômes de fruit. Parfois nous changions pour la même
marque mais au réglisse. La paquet passait de mains en
mains, surtout dans les miennes et je passai du temps
à choisir les parfums. Je crois me souvenir que les
préférés étaient ceux au citron! Cela n'a pas beaucoup
changé... Bien calés dans les fauteuils, nous pouvions
en toute sérénité voir le cinéma s'enfoncer dans le
noir avant de ce laisser emporter par le film...
Ces photos évoquent le souvenir tendre des bonbons Krema!
Le cinéma lui est entré dans l'histoire, car c'est de là
qu'Eddy Mitchell plus tard animera sa célèbre émission
« la dernière séance »!